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Demain, et demain, et demain, un roman qui marque dès aujourd’hui

Demain, et demain, et demain, un bien étrange titre faisant référence à Shakespeare pour un roman abordant jeux-vidéos, amitié, malentendus, amour inconditionnel.

L’histoire est celle de Sam et Sadie, de vieux amis d’enfance qui ne se sont pas vus depuis des années suite à un quiproquo malheureux qui a mis un terme à leur relation. Alors qu’ils se croisent dans le métro par hasard, Sadie tend à Sam une disquette contenant un jeu-vidéo qu’elle vient de programmer et qu’elle veut lui faire tester. Après avoir joué au dit jeu, Sam décide de demander à Sadie de s’associer à elle et de créer un jeu-vidéo en commun. En effet, lui est un joueur invétéré depuis ses plus jeunes jours tandis que Sadie est dans le parcours dédié au développement de jeux au MIT. De là, tous deux s’associent à Marx, meilleur et unique ami de Sam et planchent sur ce qui se révélera être un carton absolu, Ichigo. Un succès inattendu suit la sortie du titre et le trio se retrouve propulsé sur le devant de la scène jeu-vidéoludique. Or, cette célébrité soudaine va amener à des tensions au sein du groupe, notamment lorsque Sam est érigé comme icône de la jeune entreprise, aux dépens de Sadie. En parallèle, cette dernière entretient une relation abusive avec un professeur qui est aussi un important programmeur de jeux-vidéos et qui sert de mentor aux trois jeunes gens. 

Nous suivons alors Sam, Sadie et Marx sur une période de plusieurs années, les voyant connaître succès, désillusion, amour, amitié, déception et deuil. 

L’intrigue se déroule durant les années quatre-vingt dix, période marquée par le racisme, l’homophobie, le sexisme. Aussi, avec ce roman, l’autrice interroge ces sujets à travers ses personnages, leur origine, leur condition, leur vie.

Il existe deux types de romans, ceux à intrigue, et ceux à personnages. Demain, et demain, et demain fait clairement partie de la seconde catégorie. Rares sont les romans insufflant un tel souffle de vie à ses personnages. Certes, ceux-ci ne sont pas toujours logiques, ou réfléchis, ou même agréables, mais c’est ce qui fait leur charme. Le changement régulier de focalisation interne qui passe d’un personnage à l’autre nous permet de mieux comprendre leur personnalité et façon de penser. Eux ne se comprennent pas les uns les autres, nous sommes les seuls à avoir toutes les ficelles reliant ces personnages, les seuls à saisir l’essence de leurs relations. 

Outre cela, le roman est écrit avec une justesse et une littérarité qui nous touche, qui nous fait ressentir avec force ces émotions auxquelles les personnages eux-mêmes ont du mal à donner des noms. En parallèle, l’intrigue, bien que simple, est efficace, pleine de sous-couches d’intrigues, d’analepses et de prolepses. C’est un roman fourmillant de vie, teinté de références aux jeux-vidéos. N’ayez crainte si vous n’êtes pas familier à cet univers, cela n’est pas un frein à la lecture mais au contraire, une porte ouverte sur ce monde !

C’est donc une lecture que je n’aurai de cesse de conseiller, chacun pouvant y trouver un élément, une intrigue, un personnage ou un style pouvant lui plaire.

Pour avoir un retour concernant l’accueil critique des médias sur ce titre, vous pouvez retrouver cet autre article rédigé par mes soins. 

Demain, demain, demain de Gabrielle Zevin, éditions Fleuve, 2023