Crédit image : Pexel, Brown Leopard on Green Grass

Le rêve du jaguar de Miguel Bonnefoy : Un voyage onirique à travers l’histoire du Vénézuéla

Après Héritage et Le voyage d’Octavio, Miguel Bonnefoy poursuit son exploration de sa mythologie familiale en revenant au Vénézuéla avec son nouveau roman Le rêve du jaguar. Dans celui-ci, il retrace le parcours de son grand-père : Antonio Borjas Romero. Il nous raconte son ascension sociale, depuis la misère des bas-fonds de Maracaibo au statut de chirurgien à la renommée nationale. Son histoire d’amour avec Ana Maria Rodriguez, première femme médecin du pays, l’histoire de leur descendance et, en filigrane, celle du Vénézuéla moderne.

Un style éblouissant

C’est une fresque familiale haute en couleurs que signe Miguel Bonnefoy avec Le rêve du jaguar dans laquelle transparaît l’influence de Gabriel Garcia Marquez et du réalisme magique. L’auteur décrit avec brio l’atmosphère onirique du port de Maracaibo, où tout semble possible. Son écriture imagée et poétique nous transporte dans un lieu où le réel côtoie le merveilleux. S’il souhaite raconter l’histoire de ses grands-parents, Miguel Bonnefoy n’hésite pas à modifier, à enchanter l’Histoire. Un pingouin en joyaux, un cahier remplis d’histoires d’amour, un papillon qui annonce la mort … au lecteur de faire la part entre la réalité et le mythe dans cette aventure résolument romanesque !

Des personnages complexes et marquants

La deuxième force du récit est bien ses personnages à la destinée hors du commun, et les problématiques qui les animent. L’abnégation et la volonté d’Antonio, le courage d’Ana Maria lors de son combat pour l’avortement, la quête de l’écriture de leur petit-fils… Tous viennent enrichir le récit à leur manière, y additionnant leurs propres questionnements, articulés à la plus grande histoire. En même temps que les habitants qui le peuplent, c’est le Vénézuéla lui-même qui évolue. Profondément secoué par la modernisation, la dictature et la révolution, c’est aux cris du pays entier que les personnages mêlent les leurs.

Un roman trop ambitieux ?

On le voit bien, le roman est riche, presque trop. En effet, la multiplication des thèmes donne parfois, à la lecture, un sentiment de survoler certains sujets et certains personnages. De même, le style si efficace dans la première partie tend à s’essouffler quelque peu. Le Maracaibo industrialisé semble moins se prêter à l’atmosphère merveilleuse qui faisait la force de la première partie du récit et les évènements s’enchaînent à un rythme trop effréné. De même, la répétition de certains procédés d’écriture apporte, à la longue, une forme de lourdeur à l’ensemble.

Le roman n’en reste pas moins une réussite, et les fulgurances poétiques qui le parsèment font vite oublier ses quelques défauts. Un fabuleux voyage à travers la vie d’un pays, dans sa beauté, ses drames et sa complexité.

Le rêve du jaguar de Miguel Bonnefoy, Rivages, 2024.