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Aria ou la « simple mélodie du malheur », un chant au pays de l’enfance

Aria, pour un voyage humain, exotique et touchant au cœur d’une œuvre magistrale et puissante

Pour une histoire de l’Iran

Nazanine Hozar s’approprie cette histoire de l’Iran. S’inspirant des évènements qui se sont déroulés, elle retrace le parcours des populations iraniennes. Le prologue situe l’histoire en « 1953, Téhéran ». Elle y dessine le paysage de la capitale à cette époque.

Nazanine Hozar y mentionne les différents évènements historiques tout en les mêlant à une fresque sociale de l’Iran. Chacun des personnages raconte l’histoire iranienne à travers son histoire personnelle. L’écrivaine nous projette au cœur de cet Iran et des destins individuels dont le pays est parsemés. Ces histoires sont plurielles, pièces uniques d’un puzzle gigantesque, Nazanine Hozar les recolle afin de nous faire découvrir l’histoire de son pays natal. Un pays perdu.

Une ode féministe

L’écrivaine prend pour protagoniste une petite fille, et appelle son roman par son nom. Si le procédé n’est pas nouveau en littérature, ici, le pays est particulièrement patriarcal. Le choix de prendre une petite fille comme protagoniste n’est donc pas sans importance. Aria, c’est en persan « le peuple iranien ». Mais Aria c’est aussi un prénom de garçon, ce qui lui est souvent rappelé dans le roman. Cette dernière également abandonnée du fait de son genre… Comment alors ne pas y voir alors une forme de jeu de la provocation de la part de l’auteure ?

Aria c’est une ode féministe, un récit ponctué de personnages féminins qui ont du caractère. Ces personnages féminins sont marquants par leur force, par leur courage, mais aussi et surtout par leur résilience. Car, oui, les personnages d’Aria, ce sont avant toute chose, des victimes. Le récit est divisé en quatre parties, chacune d’elle prend le nom d’une femme du récit, on y retrouvera ainsi Zahra, Fereshteh, Mehri, puis Aria. Ce sont des femmes meurtries par les violences, des femmes passionnées, des femmes fortes.  

« Une simple mélodie du malheur » ?

Charles Dantzig dit à propos du Docteur Jivago que c’est « une simple mélodie du malheur ». Ainsi, Aria ne serait-ce pas non plus qu’une « simple mélodie du malheur » où l’on passe de souffrance en souffrance, de personnage malheureux à personnage malheureux ?

Si Nazanine Hozar ne brandit pas le drapeau de ses convictions politiques au sein de son livre, cette mélodie du malheur que l’on trouve dans le roman tisse la critique d’un contexte historico-politique sans équivoque.

En avril 2021, plusieurs publications sont partagées sur Twitter venant tout droit de l’Université de Téhéran. Ce sont des images tirées d’un livre d’Histoire de l’Art dans lesquelles des reproductions du peintre Salvador Dali ont été en partie recouvertes au marqueur noir. Le livre de Nazanine Hozar prend pieds dans un Iran du passé, et pourtant il ne paraît pas si lointain.

Aria, ce n’est pas qu’un roman, c’est une partie de l’histoire. C’est un roman qui donne la parole aux piégés, aux censurés, ceux qu’on a privé de leur voix. Aria c’est une lumière dans la nuit, un espoir pour tout ceux qui ont souffert ou qui souffrent toujours d’un régime tyrannique. Aria, c’est un souffle d’optimisme qui n’oublie jamais de garder les pieds sur terre.