L’un des festivals les plus attendus de l’année fut très certainement le Quai des Bulles. Il est le deuxième plus grand festival de France après celui d’Angoulême et se déroule à Saint-Malo. Créé en 1981 et centré sur la bande dessinée ainsi que l’image projetée, celui-ci fêtait sa quarantième année du 29 octobre au 1er novembre 2021. Cette année environ 40 000 visiteurs dont quelques étudiants du M2 édition s’y sont rendus afin de rencontrer les 700 auteurs du festival. Nous vous proposons donc de vous faire part de notre expérience sur place.
Nous avons eu l’opportunité de rencontrer de nombreux éditeurs et de pouvoir échanger plus profondément sur le fonctionnement de leurs maisons d’édition avec certains d’entre eux. En effet, une grande diversité d’éditeurs était présente lors du festival. Les plus grandes telles que Glénat et Delcourt ou très anciennes comme la maison d’édition Soleil ou çà et là, un éditeur qui se spécialise dans la traduction. Mais aussi des maisons d’éditions plus récentes comme Kinaye et Les aventuriers de l’étrange, toutes deux créées en 2018. Mais nous avons aussi pu apercevoir des maisons éditions bien connues dans le monde du roman et qui ne sont donc pas spécialisées dans la bande-dessinée comme Albin Michel par exemple. Parmi ces nombreux éditeurs nous avons eu la chance de pouvoir échanger avec nombre d’entre eux, en premier lieu en tant que lecteurs mais aussi en tant qu’étudiants en master édition. L’une d’entre nous a découvert une maison d’édition à l’allure de monde imaginaire et qui fut un véritable coup de coeur :
«Il s’agissait d’une structure d’auto-entrepreneur créées par Morgil (La dessinatrice des comics en vente sur le stand) où nous pouvions trouver des comics, des BDs format mangas (en collaboration avec Skaldgard pour l’écriture), ainsi que des arts-books. J’ai acheté deux de leurs œuvres, tout d’abord Le Dévoreur De Temps qui est une saga de six comics se basant sur la mythologie nordique, puis Un Secret Bien Gardé où nous nous retrouvons en compagnie d’une barde et d’un elfe qui vont devoir faire équipe malgré leurs caractères opposés dans une aventure contée en deux volumes.»
Nous avons eu aussi l’opportunité de rencontrer de nombreux auteurs lors de ce festival et nous avons apprécié le temps passé par chaque illustrateur sur leurs dédicaces. En effet, l’avantage de rencontrer un illustrateur est que l’on peut passer cinq minutes à échanger avec lui car ce dernier prend souvent le temps de dessiner pour notre plus grand plaisir. Nous avons donc pu échanger avec plusieurs de nos illustrateurs préférés comme Benjamin Lacombe (L’étrange famille Appenzel) ou encore Sophie Lambda (Tant pis pour l’amour). Mais nous avons aussi pu découvrir de nouveaux illustrateurs, et avec eux, leurs univers et œuvres extraordinaires : Gaet’s, l’auteur de la saga RIP ou une des illustratrices de la maison d’édition Kinaye : Mélanie Allag. Nous nous sommes rendus compte, pendant notre visite, qu’il n’y avait pas que des auteurs français mais aussi certains venant du monde entier. Notamment au stand de la maison d’édition Cà et Là, nous avons pu rencontrer une illustratrice taïwanaise (Li-Chin Lin, autrice de Goan tau chez moi) mais aussi un illustrateur brésilien (Marcello Quintanilha, auteur de Écoute, Jolie Marcia). Nous avons également échangé avec une autrice roumaine au stand des éditions Les Aventuriers de l’étrange, Ileana Surducan.
Ajoutés à l’événement principal de ce week-end spécial festival Quai des Bulles, se tenaient d’autres événements secondaires à l’extérieur mais aussi à l’intérieur des remparts de Saint-Malo. Dans le palais du Grand Large, nous avons pu déambuler le long de plusieurs expositions dédiées aux illustrateurs Pénélope Bagieu (Les Culottées) et Frédéric Pillot (Tambow) mais aussi à la revue de bande dessinée bretonne La Vilaine. Nous pouvions également assister à des tables rondes d’auteurs, des séances de cinéma ainsi qu’à la réunion sur scène d’un auteur, un illustrateur et un musicien autour de lecture de contes africains. À l’intérieur même de Saint-Malo, les rues prenaient les couleurs de ce festival impressionnant. En effet, un parcours artistique pouvait être aperçu au fil de nombreuses ruelles de cette ville atypique. Certaines programmations se tenaient à l’intérieur même des cafés, comme la présence de la mangaka Archna (Waterlily) au Columbus café & Co ou celle de l’illustrateur Patrick Prugne (Canoë Bay) à la Tour Bidouane.
Lors de ce festival nous avons aperçu d’autres intervenants, comme des journalistes venus de France mais aussi de l’étranger. Certains stands étaient aussi attribués à des écoles de graphisme et d’art de l’Ouest de la France. Mais nous avons été surtout étonnés de noter la présence de représentants du site internet Babelio, avec lesquels nous avons pu discuter et l’une d’entre nous a même eu la chance de se faire interviewer par eux (vous pouvez retrouver son intervention sur ce lien. (45min28).
Quelques semaines après le festival Quai des bulles de Saint-Malo, nous avons retrouvé Cassandre, une étudiante de la promotion du Master 2 édition d’Angers.
Cassandre, 27 ans, participait pour la troisième fois au festival Quai des bulles où elle tenait un stand en tant que bénévole aux côtés de ses collègues et amis de la maison d’édition associative nantaise Vide Cocagne.
Spécialisée dans la bande dessinée et l’édition d’albums jeunesse dont la ligne éditoriale est très engagée, Vide Cocagne n’est pas passée inaperçue au sein du festival. En effet, Cassandre nous a confié que très rapidement leurs investissements financiers avaient été amortis et qu’ils avaient dès lors pu profiter sans réserve de la bonne ambiance : « Ce festival s’est particulièrement bien passé, on ne s’attendait pas à ce que le public soit aussi réceptif et aussi heureux d’être là ! »
Parmi les œuvres présentées au festival, certains de leurs titres ont eu un réel succès : « C’est un peu ce qu’on va appeler nos best-sellers, avec des milliards de guillemets parce qu’on est pas sur des millions d’exemplaires. » C’est le cas notamment de la collection de bandes dessinées Soudain réalisée par Théo Calmejane mais aussi de Sauvagede Thomas Gilbert ou encore L’anniversaire du grand mammouth illustré par Thierry Bedouet et écrit par Fabien Grolleau.
Toutefois, un festival comme Le Quai des bulles demande une organisation assez rigoureuse. Nous avons interrogé Cassandre à ce sujet afin d’en savoir plus sur les coulisses d’un festival :
Comment se prépare un festival ?
Dans notre cas, Vide Cocagne est une association, le budget est assez restreint, il faut donc contacter des bénévoles. Il faut réserver un emplacement trois mois à l’avance à peu près et aussi s’occuper de tout ce qui est défraiement, gestion des stocks pour le festival et notamment des nouveautés à paraître pour pouvoir les mettre en avant. Il faut prévoir un peu de goodies pour que ce soit cool et attrayant. Et comme c’était Halloween, on avait prévu des bonbons et quelques décorations.
Comment est-ce que vous vous organisez avec les auteurs que vous invitez ?
Déjà il y a toujours la difficulté de trouver un logement, il faut s’y prendre à l’avance et toujours avoir un plan B. Et puis il faut mettre les auteurs à l’aise quand ils sont là, être aux petits soins. »
Les éditions Vide Cocagne logent les intervenants à leurs frais, mais Cassandre nous rappelle d’ailleurs que dès 2023, toute présence d’auteur à un festival devra être rémunérée. Elle poursuit :
« Le public est souvent féru de dédicaces quand il vient au festival donc on met en place un calendrier de dédicaces réparti sur le weekend. En plus, les auteurs sont souvent présents pour d’autres maisons d’édition, pas exclusivement pour la notre, donc il faut que ça soit bien organisé.
La préparation d’un festival est plutôt amusante ou c’est beaucoup de pression ?
C’est beaucoup de pression parce que c’est payant et assez cher ! On a besoin d’être remboursés, c’est l’objectif premier. Mais cette année tout s’est très bien passé, on a été remboursés rapidement, on a établi des contacts et les rencontres qu’on a faites ont été bénéfiques. On a pu vraiment s’amuser dès le deuxième jour. »
Curieux d’en savoir un peu plus sur son ressenti, nous avons demandé à Cassandre quel a été son meilleur moment du weekend et sa réponse fut sans appel : « Lorsque le deuxième jour les étudiants du M2 sont venus. Nous étions dans la partie « fun » du festival puisque nous étions déjà passés en bénéfice. Et puis, ça m’a permis de redécouvrir le festival à travers des personnes proches ne l’ayant pas vécu avant. C’était une vraie aventure ! ».
Passionnée par l’édition, la participation de Cassandre dans l’évolution de Vide Cocagne ne s’arrête pas là. Elle nous fait l’honneur de nous informer de sa collaboration sur un livre à paraître et de son travail en cours sur la création d’une bande dessinée. Le festival du Quai des Bulles s’est déroulé à merveille pour Cassandre et elle a déjà hâte de réitérer l’expérience.
Ce festival était une découverte pour plusieurs d’entre nous. La journée fut rythmée par les rencontres et les découvertes d’auteurs, d’illustrateurs ainsi que d’éditeurs avec qui nous avons pu discuter. Nous nous sommes rendus compte qu’une journée était bien trop courte pour faire le tour de tous les stands. Le festival du Quai des Bulles revient du 7 au 9 octobre 2022, notre conseil : allez-y et pour plusieurs jours. Et qui sait, peut être que vous nous croiserez au détour d’un stand ?