Lilia Hassaine s’inspire de cette citation du Bateau ivre de Rimbaud pour le titre de son roman Soleil amer. Cela fait penser au soleil de l’Algérie, quelque chose de chaud et de réconfortant, comparé à l’amertume que peuvent ressentir les immigrés qui ont quitté leur pays en pensant trouver une vie meilleure, ou les enfants d’immigrés qui peinent à s’intégrer pleinement dans une société qui les regarde d’un mauvais œil. C’est un titre poétique pour une œuvre écrite avec beaucoup de délicatesse.
J’ai dans l’ensemble beaucoup aimé le roman. C’est un roman sobre, avec un style épuré mais poétique et fluide. Comme il est dit dans une des critiques, Lilia Hassaine manie très bien l’art de l’ellipse et des non-dits. Elle n’accompagne pas le lecteur dans la découverte des secrets, elle le laisse deviner seul, sans lui pointer les indices du doigt. J’ai trouvé le livre très doux, même s’il parlait de sujets assez violents.
Le roman s’inspire d’une histoire familiale que lui a raconté́ sa mère, ce qui fait qu’il y a une certaine pudeur dans l’écriture. C’est vraiment respectueux des personnages, on comprend toutes leurs motivations, bonnes ou mauvaises, et on ressent beaucoup d’empathie pour eux. Mais Lilia Hassaine ne prend pas de pincette pour autant, les personnages rendent des comptes pour leur erreurs et sont finalement profondément humains, avec des émotions humaines. Le choix de porter son intrigue sur vingt ans permet aussi d’étaler les thématiques sociales qui parsèment son roman. En effet, parler du viol, de violence conjugale, de la perte d’un enfant, de la drogue, du sida, etc. peut paraitre lourd dans un roman de 160 pages. Mais Lilia Hassaine manie sa plume avec adresse et évite l’indigestion en discutant de ses sujets avec retenue.
Le roman raconte l’histoire d’un espoir qui s’éteint au fur et à mesure, jusqu’à la désillusion de la fin.
Soleil amer de Lilia Hassaine, Gallimard, 2021
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