Alain Mabanckou reprend le chemin de son Congo-Brazzaville natal, dans Le commerce des Allongés. On retrouve, dans ce 14e roman de l’auteur franco-congolais, la malice et la langue inventive qui lui ont valu le prix Renaudot en 2006 avec Mémoire de porc-épic.
Des morts bien vivants
A Pointe-Noire, dans le cimetière des pauvres, dit Frère-Lachaise, Liwa Ekimakingaï surgit de sa tombe fraichement creusée. Dans ses habits de fête, le jeune homme tente de se remettre les idées à l’endroit. Celui dont le nom signifie « La mort a eu peur de moi » doit bien accepter qu’il ne fait plus partie du monde des vivants.
Le jeune homme va alors tenter de faire la lumière sur les circonstances troubles de sa mort. Il aidé par tout une galerie de personnages hauts en couleur, les habitants du cimetière. Liwa remonte ainsi le fil de son histoire, de son enfance jusqu’à sa rencontre fatidique avec la belle Adeline, le soir de la fête de l’Indépendance.
Une fable poétique et politique
S’il n’a pas reçu la couverture médiatique des derniers livres de Despentes ou Nothomb, le roman d’Alain Mabanckou s’est retrouvé dans de nombreuses sélections de la rentrée littéraires dans les médias. Et les critiques sont positives.
Comparé au Petit-Prince de Saint-Exupéry par Clara Dupont-Monod, sur France-Inter, Le Commerce des allongés est aussi décrit comme « une pépite littéraire, entre le conte, le mysticisme, la critique sociale et politique du Congo, une visite guidée de Pointe-Noire » par Emmanuel Kherad, dans l’émission « La Librairie francophone ». Le livre a ainsi touché par les différents niveaux de lecture qu’il offre et par la vision du Congo, pays natal d’Alain Mabanckou, qu’il a quitté depuis longtemps mais qui reste sa source d’inspiration principale.
Un livre pour le public… et pas pour les prix littéraires
Dans un article sur Le Monde Afrique, Kidi Bebey écrit : « Le Commerce des allongés renoue avec la veine picaresque de l’auteur, celle qui l’a rendu populaire avec des titres comme Mémoires de porc-épic ou Verre cassé. Car c’est au public avant tout que l’écrivain congolais adresse un clin d’œil, en fustigeant par la moquerie les malversations des hommes politiques ou en pointant du doigt la mauvaise gestion d’un pays toujours plus appauvri par la classe des nantis. Pour qui sait lire sous le vernis du rire, l’humour s’avère grinçant jusqu’à la satire. »
En effet, Alain Mabanckou a écrit ce livre pour le lecteur, pour « redonner le pouvoir même de la fiction au petit peuple », comme il l’explique dans une interview. Si le roman a eu un franc succès auprès du public, il n’a cependant pas reçu de prix littéraires, malgré deux nominations pour le prix de l’Académie française et celui des Libraires en Seine.
Il n’en reste pas moins que c’est un retour réussi pour Alain Mabanckou, d’ordinaire très prolifique et qui n’avait pas publié de romans depuis quatre ans, car il ne voulait pas sortir de livre pendant la pandémie.