Nathacha Appanah est une journaliste et auteure mauricienne. Elle a reçu en 2016 le premier prix Fémina des lycéens pour son roman Tropique de la violence. Elle publie en cette rentrée littéraire Le ciel par-dessus le toit. Phénix, mère de famille au passé douloureux, élève seule ses enfants avec froideur et distance. Sa fille Paloma quittera le domicile dès qu’elle le pourra. Loup, le cadet, décide un jour de prendre la voiture pour retrouver sa sœur et provoque un accident qui lui vaut d’être enfermé dans une prison pour enfant. La mère et la fille vont devoir reprendre contact pour libérer Loup.
L’effervescence de la rentrée littéraire
La presse s’intéresse rapidement au nouveau roman de Natacha Appanah. Des hebdomadaires comme Le Figaro littéraire, Le Nouveau Magazine Littéraire ou encore l’Express placent Le ciel par-dessus le toit parmi les livres remarqués en cette rentrée littéraire. Tous évoquent les mêmes éléments : le succès de son roman Tropique de la violence, le retour des thèmes de la noirceur et de la violence et, enfin, l’écriture douce et poétique de l’auteure. Le roman apparait dans les premières sélections de plusieurs prix littéraires : Goncourt, Goncourt des lycéens, Fémina, Renaudot et Renaudot des lycéens.
Néanmoins, la longueur et le style divisent la critique. En effet, le roman semble relativement court avec ses 128 pages. Certains journalistes apprécient la volonté de l’auteure de toucher directement le lecteur en ayant les mots justes : « Une angoisse diffuse, sourdant des silences et réactions de chacun, tend ce très beau livre. Court et intense.[1] » (La Libre Belgique, 28/09/19). L’auteure se justifie en expliquant que son roman « est assez court car il faudrait que chaque mot ait une place. […] J’essaie toujours, dit-elle, de garder un équilibre entre prose et poésie.[2] » (France 24, 27/12/19). D’autres journalistes condamnent le manque de prise de position de l’auteure : « [le roman] se donne l’ambition programmatique du conte […] mais l’une des choses qui font que ce texte ne fonctionne pas complètement […] tient à la volonté de démonstration. […] Et si la parabole du livre a la transparence du conte, elle est aussi, en fin de compte, un peu trop anecdotique pour captiver vraiment.[3] » (Le Nouveau Magazine Littéraire, 01/09/19).
Une bataille compliquée
Malgré son apparition dans les secondes sélections des prix littéraires, Natacha Appanah peine à être visible au mois d’octobre. Karine Tuil, auteure du roman Les choses humaines également publié également chez Gallimard, est nommée pour des prix littéraires similaires. Son roman, très actuel, est fortement imprégné par le mouvement MeToo. Elle remportera le Prix Goncourt des Lycéens et le prix Interallié. Gallimard raflera deux autres prix littéraires grâce à Sylvain Prudhomme et son roman Par les routes (Prix Fémina) et Sylvain Tesson avec La panthère des neiges (Prix Renaudot). La maison d’édition va profiter de leurs succès et accentuer leur couverture médiatique au détriment des autres auteurs.
L’Obs indique que Natacha Appanah a vendu 26 000 exemplaires du livre à la fin octobre[4]. L’auteure se consolera néanmoins en obtenant le prix « Le choix Goncourt de L’Orient » le 13 décembre 2019.
Quel bilan ?
Appanah a publié un roman touchant, court mais intense. Elle a malheureusement manqué de visibilité et a dû faire face à une concurrence acharnée au sein même de sa maison d’édition. De plus, ayant déjà obtenu le prix Fémina des lycéens en 2016, il semblait peu probable que l’auteure soit une nouvelle fois récompensée.
La rentrée littéraire fait donc figure d’évènement incontournable. Cependant, depuis quelques années, nous pouvons remarquer une tendance à l’homogénéisation des thèmes abordés dans les livres présents lors de ces rentrées, notamment pour ceux qui parviennent à obtenir un prix. Écrit-on maintenant en sachant très bien qu’il vaut mieux évoquer certains sujets (féminisme, immigration, etc.) plutôt que d’autres afin de réussir à vendre et obtenir des prix ?
Vous pouvez également retrouver mon avis personnel sur le roman.
[1] Verdussen, M. (28/08/19). De prisons et d’autres. La Libre Belgique, p. CULT21.
[2] Dupont, L. (2019). La rentrée littéraire, un phénomène français [Interview]. Dans L. Dupont, À l’affiche, France 24. https://www.france24.com/fr/20190830-culture-alaffiche-rentree-litteraire-nathacha-appanah-ciel-dessus-toit
[3] Weitzmaan, M. (01/09/19). Les feux de l’amour. Le Nouveau Magazine Littéraire, p. 53.
[4] Leménager, G. (13/11/19). Nathacha Appanah, ou « comment mener cette putain de vie pour qu’elle ne vous morde pas ? ». L’Obs (site web), Bibliobs. https://www.nouvelobs.com/critique/20191213.OBS22284/nathacha-appanah-ou-comment-mener-cette-putain-de-vie-pour-qu-elle-ne-vous-morde-pas.html